Michel Sheller, président de la 3AF (Association aéronautique astronautique de France), et Yves-Marie Moray, président de la CED (Culture économie défense) ont donné hier le coup d’envoi du 10e forum IES (Intelligence économique et stratégique) et de la deuxième université d’été de la CED qui se tiennent du 6 au 8 octobre au palais des congrès de Reims. L’objectif de ces rencontres est de décrypter les enjeux et dresser les perspectives pour les entreprises françaises à la lumière des pratiques européennes en matière d’intelligence économique.
Le ton fut donné dès l’ouverture des travaux en replaçant le rôle de l’entreprise au cœur des enjeux de puissances dans le cadre de la construction européenne face aux défis de la globalisation de l’économie.
« Nous sommes résolument engagés pour l’Europe, et les entreprises françaises y jouent un rôle de premier plan. L’intelligence économique est un instrument désormais indispensable pour maintenir et développer une industrie forte, avec des technologies performantes et compétitives dans un environnement international hyperconcurrentiel », déclare Michel Schuller.
« Les Européens doivent avoir confiance
en leurs capacités à faire face aux défis
de la mondialisation. »
Anne Houtman, directrice de la représentation de la Commission européenne en France
Entre d’un côté les nations, et de l’autre, la globalisation, l’Europe est-elle un échelon inutile dans la marche vers une gouvernance mondiale, ou est-elle un échelon intermédiaire nécessaire ? C’est la problématique à laquelle a répondu Anne Houtman, directrice de la représentation de la Commission européenne en France. « L’Europe existe. Elle a une puissance qui vient de son droit, de sa population, de son marché intérieur, de sa démocratie », affirme-t-elle.
Optimiste, Anne Houtman considère que l’Europe dispose de tous les atouts pour faire face à la concurrence mondiale et la montée en puissance des pays émergents. Elle peut jouer un rôle éminent dans le redéploiement des relations internationales, sur le plan politique, économique et culturel, pour peu que les Européens aient confiance en leurs capacités à faire face aux défis de la mondialisation, a-t-elle souligné.
Cette première journée a permis d’illustrer ce propos par la présentation des enjeux spécifiques de la région Champagne-Ardenne. François Cravoisier, président de la CRCI locale, a brossé le portrait des potentialités d’innovation que recèle le tissu économique régional. Un exemple en a été donné par Daniel Thomas, président du pôle de compétitivité Industries et Agro-ressources, et Jean-Marie Chauvet, animateur de la plate-forme BRI (Bioraffinerie, Recherches, Innovations), qui ont expliqué le rôle moteur qu’ont joué les agriculteurs de la région dans le succès de cette plate-forme.
Ils ont relaté comment ces agriculteurs se sont emparés des problématiques de biotechnologies industrielles, il y a 25 ans, pour se doter d’un laboratoire de recherche, devenu aujourd’hui l’embryon d’un cluster d’innovation à l’intérieur d’une plate-forme industrielle de premier plan. Celle-ci associe notamment une sucrerie, une usine de transformation du blé en glucose, amidon et bien d’autres produits, ainsi qu’une usine de production d’éthanol. D’ores et déjà, le pôle est leader européen sur certains produits destinés à l’industrie des cosmétiques.
Cet écosystème travaille dans la perspective de l’après-pétrole en développant les pistes de recherche menant à la « chimie verte », dont l’objectif est d’utiliser les matières végétales et plus largement de la biomasse pour inventer les matériaux du futur à partir de ressources totalement renouvelables.
Les retours d’expérience, c’est l’orientation spécifique donnée cette année à ces assises. « Nous préférons montrer des cas concrets et ne pas rester fixés uniquement sur des questions théoriques. Les méthodologies et les outils de l’intelligence économique stratégique sont parlants lorsqu’ils sont exposés à travers des cas concrets », estime Anne Venables, secrétaire exécutive de la 3AF, et qui a coordonné de main de maître l’organisation de ce forum.
L’assistance, composée entre autres d’institutionnels, de représentants de collectivités, de chercheurs, d’industriels de l’aéronautique, du spatial, de l’agroalimentaire, du secteur des services, des chambres consulaires, aura de quoi s’inspirer avec les nombreux cas pratiques programmés durant ces trois journées et couvrant largement les thématiques de la veille, de l’analyse, des processus de décision jusqu’à la cartographie des acteurs et des compétences, en passant par la propriété intellectuelle et les questions de conformité et de normalisation.