Google, ni toujours ni pour toujours

Qu'il semble loin le temps où Google le révolutionnaire pouvait changer son fusil d'épaule pour se mettre parfaitement en phase avec sa communauté. Le récent arrêt de son service Google Reader aura bien fait résonner le tocsin, mais sans autres effets que les pleurs semble-t-il de quelques-uns de ses utilisateurs, et plus sûrement la rage de tous les autres, jurant bien qu'on ne les y reprendrait plus. Normal.

Parmi les autres critiques qui visent Google, il y a celles concernant son réseau social, pointant la pauvreté estimée de son audience. Une étude récente de Nielsen enfonce même le clou et nous apprend que, au mois de mars, le visiteur moyen aurait passé 6 minutes 47 secondes sur Google+ contre 6 heures et 44 minutes sur Facebook. Impressionnant.

A Collaboratif-info, nous n'avons pas encore vraiment parlé de Google+. En fait, nous étions tellement persuadés que le réseau social connaîtrait assez vite une version entreprise que nous guettions, attendant notre heure.

Las, Google+ a bien connu nombre d'évolutions majeures ces derniers temps, avec notamment l'apparition des communautés. Il a même connu cette semaine une mise à jour importante de son design. Mais rien laissant présager une orientation militante vers le monde professionnel.

Sur le terrain, les projets Google Apps en entreprise ne manquent pas en France, avec parfois même une franche dimension d'intranet communautaire. Mais de Google+, nulle trace.

Certains cas existent malgré tout. Récemment, le consultant en management et stratégie Anthony Poncier consacrait ainsi un billet à l'usage de Google+ par l'éditeur Talentsoft. Le directeur produit de ce dernier, Alexandre Pachulski, y expliquait tout l'intérêt de Google+ comme réseau social d'entreprise, concluant néanmoins que ce qui manquait le plus à ce dernier était... des membres.

« Je n’étends pas l’usage de G+ à toute l’entreprise car beaucoup de personnes me répondent, quand je leur en parle, qu’elles sont déjà sur Facebook et ne veulent pas multiplier les réseaux sociaux », indiquait-il, soulignant que le « travail d’évangélisation concernant le fait que G+ soit davantage tourné entreprise que Facebook est loin d’être terminé ».

Déception à propos des Google Apps

Pour certains spécialistes de Google, le problème n'est cependant pas que d'ordre perceptif. Miguel Membrado, de la société Kimind, qui réalisa le premier gros déploiement de Google Apps en France, chez l'équipementier automobile Valeo en 2008, exprime ainsi son scepticisme quant à la possibilité pour Google+ de se positionner comme véritable RSE dans une très grande majorité d’entreprises.

« Ce qui manquait à Google Apps depuis 2008 était un réseau social, écrit-il dans un billet récent. Communautés et hangouts de Google+ permettent enfin d’aborder cela. Mais Google+ pose un vrai problème aux entreprises tel qu’implémenté, et nous n’arrêtons pas de demander à Google de corriger cela, c’est que les profils des utilisateurs pour utiliser Google+ sont obligatoirement publics ! [...] Et cela la plupart des entreprises ne le veulent pas. Elles ne veulent pas que les profils de leurs employés soient publics. C’est la limite (actuelle en tout cas) de la vision consumer/entreprise. »

Mais pour Miguel Membrado, dont le billet est justement intitulé « Microsoft rattrape son retard sur Google », le problème dépasse Google+, il touche Google Apps lui-même, confronté à l'arrivée d'Office 365 de Microsoft.

Et le verdict est net : « Chez Kimind, nous sommes aujourd’hui persuadé que 2013 va être une année charnière, et que Microsoft va devenir le leader des solutions collaboratives dans le cloud avec Office 365 », indique-t-il. Conclusion logique, et tournant majeur pour celui qui voyait en Google le révolutionnaire de la bureautique et de la collaboration, il annonce que sa société deviendra aussi revendeur d'Office 365.

Google s'est fait distancé par Microsoft faute « de mener les campagnes marketing et de communication nécessaires pour entrer en force dans le monde de l’entreprise, de participer aux salons qui comptent dans le domaine, de faire émerger un véritable écosystème équitable et en nombre de partenaires », explique notamment le CEO de Kimind.

Si pour certains déçus de Google Reader ce ne sera plus Google pour toujours, pour des acteurs comme Miguel Membrado ce sera donc Google mais plus toujours.

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