Quels sont les enjeux des réseaux sociaux d'entreprise (RSE) au cours des prochains mois ? Telle était la question posée lors du barcamp qui clôturait les deux jours et demi du salon Solutions Intranet & Collaboratif.
Des représentants des éditeurs blogSpirit et IBM et des sociétés de conseil Lecko et Nextmodernity se sont prêtés à l'exercice. Au petit jeu de savoir qui influence qui, il n'est pas facile de répondre. En tout cas, leurs analyses convergent sur de nombreux points, à commencer sur la situation actuelle.
Un premier constat se fait jour : le RSE n'a pas tenu toutes ses promesses. « Le simple fait de déployer un tel outil ne suffit pas à instaurer des pratiques collaboratives et à générer de la valeur », faisait remarquer Anthony Poncier, de Lecko.
La conduite du changement est une première réponse, insuffisante toutefois si la plate-forme reste déconnectée des flux business. La collaboration n'est qu'un moyen et non une finalité. « Aujourd'hui, le système fonctionne si l'utilisateur se sacrifie et joue le rôle de middleware », ajoute Bertrand Duperrin, de Nextmodernity.
Autrement dit, c'est à l'utilisateur de se débrouiller pour mettre du liant dans le système d'information, les applications ne se causant pas entre elles. Une situation inconfortable qui limite l'usage des RSE. Ce que confirme Philippe Pinault, de blogSpirit : « Il y a une attente de rationalisation, de convergence pour offrir à l'utilisateur un environnement plus proche de ses besoins. »
Sur le plan technique, des premières réponses sont apportées par les éditeurs avec l'adoption du standard Activity Stream. « Il amène le flux des échanges quotidiens, qu'ils proviennent de la messagerie ou d'autres applications, dans l'environnement de travail de l'utilisateur », précise Pierre Milcent, d'IBM. La prochaine version de Connections, comme d'autres RSE (Jive, Quad de Cisco...), adopte ce standard.
Ce qui ne dédouane pas les entreprises d'avoir à repenser leurs processus et d'adapter leurs organisations. Le RSE n'est pas une baguette magique. « On arrive au bout de la logique actuelle, affirme Bertrand Duperrin. On se rend compte que pour faire fonctionner le RSE, on doit adresser les problématiques qu'il était supposé épargner. »
Il ne s'agit pas de gommer les progrès réalisés en termes de co-création, de partage de l'information et du savoir, mais de mettre ce potentiel social dans le quotidien des utilisateurs au service de l'exécution de leurs tâches. C'est à cette condition que l'entreprise tirera pleinement profit du RSE.
Pour Anthony Poncier, le Social CRM (gestion de la relation client version sociale) est sans doute le domaine qui offre les plus belles perspectives à court terme car ses bénéfices sont visibles et facilement quantifiables. Là encore, cela nécessitera des adaptations organisationnelles en interne.
« Il y a une vraie demande en BtoBtoC », précise, pour sa part, Pierre Milcent. Dans un modèle de vente indirecte, l'entreprise n'est pas en contact direct avec ses clients finaux. Le réseau social est alors un moyen de nouer des relations avec eux, de mieux connaître leurs besoins, voire de mener des actions de co-innovation.
Un autre enjeu pour les RSE est d'embarquer davantage d'employés. Une approche plus opérationnelle et une plus grande fluidité dans l'exécution des tâches y contribueront certainement, mais d'autres voies sont explorées. Les outils d'analyse en font partie.
L'objectif est de définir des indicateurs métiers à même de mesurer la valeur ajoutée de son réseau social. En attendant, les indicateurs actuels évoluent et ne se contentent plus d'évaluer le niveau d'activité sur le réseau social (nombre de visites), mais s'attachent à suivre le niveau d'adhésion et d'engagement (nombre de contributions, de visites de profils...).
« Les outils d'analyse peuvent aider les animateurs de communautés à déployer les bons dispositifs d'action », souligne le dirigeant de blogSpirit. En fonction des typologies des communautés, certaines actions peuvent être suggérées aux animateurs de communautés pour aider à ses membres à augmenter le niveau d'engagement ds membres.
Pour autant, « il faut se garder de reproduire les erreurs du passé en utilisant le benchmarking pour répliquer ce qui se fait dans d'autres entreprises », prévient Bertrand Duperrin. Il est rejoint dans cette analyse par Anthony Poncier, qui estime que les chemins sont propres à chaque entreprise en fonction de sa culture, sa taille, son secteur d'activité.
Existe-t-il des bonnes pratiques sur étagère ? Il est sans doute trop tôt à ce stade pour trancher. En revanche, les dernières conférences autour de l'entreprise 2.0 ont mis en évidence des erreurs connues qui peuvent être évitées. A défaut de savoir ce qu'il faut faire, on sait au moins ce qu'il ne faut pas faire.
Un autre sujet fait débat : la gamification. Pour Philippe Pinault, « on devrait voir plus de plus en plus de sites participatifs se doter de techniques de gamification avec attribution de points, de badges... »
C'est une technique d'animation qui peut servir à dynamiser une communauté. Son application dans le monde professionnel s'avère néanmoins délicate. « Elle doit rester un outil de motivation et non d'évaluation », affirme Anthony Poncier.
Le risque de dérapage est bien réel et tous les environnements ne s'y prêtent pas. Le sujet nécessite dans tous les cas d'être bien cadré en amont avec la direction des ressources humaines et les instances de représentation du personnel. On n'a peut-être pas fini de jouer avec les réseaux sociaux mais sur des sujets de plus en plus sérieux et importants.