Veille

Lenoard s'impose en douceur chez BNP Paribas

La plate-forme de veille Leonard, de BNP Paribas, séduit de plus en plus d'employés : près de dix mille abonnés et un millier de visiteurs quotidiens. Une dizaine de communautés sont sur les rangs pour se l'approprier et l'adapter à leurs besoins. Le succès de Leonard, dont la dernière version est en ligne depuis la mi-octobre, est d'abord celui d'une méthode.

Michel Bernardini, à l'origine de l'initiative, revient sur la genèse du projet : « Il a été initié par la direction des études économiques, qui réunit des économistes et des documentalistes, et non par la DSI ». Pour ajouter aussitôt : « Mais nous avons travaillé main dans la main avec une petite équipe informatique. »

L'étroitesse des relations entre maîtrise d'œuvre et maîtrise d'ouvrage s'est avérée déterminante. C'est un point essentiel auquel le responsable du projet attache beaucoup d'importance. Sans doute en raison de sa sensibilité métier. Aujourd'hui, il a une double casquette informatique et communication au sein des études économiques, mais il a occupé par le passé une activité de documentaliste. Pour autant, le chemin n'était pas balisé et les moyens limités.

Le projet a donc commencé modestement, avec néanmoins dès le départ la vision de ce que devait être une plate-forme de veille à l'échelle d'un grand compte : évolutive sur le plan fonctionnel, personnalisable dans ses modes de collecte et de restitution, et bien entendu taillée pour monter en charge.

Un premier pas vers le KM

Une première version de Leonard est lancée en 2004. Elle s'appuie sur le moteur de Polyspot, choisi notamment pour son respect des standards. Les développements se font en Java ou .Net quand l'outil d'Exalead, avec lequel il était en concurrence, dispose de son propre langage Exascript.

Polyspot est chargé d'une triple mission : la veille sur internet, l'indexation des quatre cents articles économiques fournis quotidiennement par l'agrégateur Mediacompil, et celle des 200 000 documents stockés dans les différentes bases documentaires de la BNP Paribas Corporate & Investment Banking (CIB), dont dépend la direction des études économiques. Comme dans tout grand compte, on trouve pèle-mêle des référentiels Filenet, Open Text, Notes... L'ajout d'un moteur de recherche en interne constituait déjà une belle avancée en cassant la logique de silos. « Un premier pas vers la gestion de connaissances », se félicite Michel Bernardini.

Dès l'année suivante, le logiciel de veille KB Crawl vient suppléer Polyspot dans sa mission de veille sur le web. Les crawlers de l'outil basé sur la brique open source Lucene manquaient de finesse. « Ils n'indexaient que des pages entières et ne savaient pas isoler une zone précise, ce qui générait du bruit », précise Michel Bernardini. De plus, les opérations de paramétrage effectuées depuis le back-office requerraient l'intervention d'informaticiens.

En 2007, nouvelle évolution : l'outil d'analyse sémantique de Temis vient renforcer la plate-forme en apportant ses capacités d'extraction d'entités, comme les noms de personnes ou de lieux. Et cette année, Lenoard est monté en puissance avec la version Platform de KB Crawl. Le passage en mode serveur de l'outil de veille sur internet a facilité son adoption à grande échelle.

L'augmentation de la puissance des machines a, dans le même temps, permis d'étendre l'apport du text mining à l'ensemble des ressources, et non plus seulement aux seuls articles de presse. Au centre du dispositif technique, Polyspot reste néanmoins incontournable. C'est lui qui joue le rôle de chef d'orchestre et dialogue avec le portail .Net.

En même temps que l'infrastructure technique de Leonard se musclait, son interface de restitution a été complètement repensée. Un aspect trop souvent négligé et néanmoins essentiel. « Nos cinq années d'expérience avec Leonard nous ont appris à soigner l'ergonomie et le visuel », souligne Michel Bernardini. L'équipe de développement, composée de trois informaticiens intervenant à temps partiel, a suffisamment capitalisé sur les usages pour mener seule ce travail, sans l'appui d'ergonomes.

Outre quelques améliorations cosmétiques mais bien utiles, comme l'utilisation de codes couleurs pour mettre en évidence les différents types d'entités nommées, la nouvelle interface se distingue par de nouvelles options de personnalisation auxquelles les utilisateurs accèdent via un système d'onglets, avec notamment une entrée Communautés.

BNP Paribas Securities Services, acteur mondial du métier titres, dispose ainsi de son propre espace délivrant une information ciblée et filtrée pour chacune de ses trois grandes activités. Avant cela, Pilar de Terry,  responsable du département intelligence du marché de la filiale Securities Services, a mené un premier travail de recueil des besoins d'information stratégiques auprès des responsables globaux des différentes activités de la banque. « Les besoins de chacun de nos clients internes sont clés dans la structure de notre espace de travail au sein de Leonard, car l'outil doit leur appartenir finalement », souligne-t-elle.

Trois grands axes de veille de marché ont été retenus : les tendances, la concurrence et les zones géographiques. « Nous avons défini notre dictionnaire métier, ce qui nous a amené à créer nos propres cartouches dans l'outil de Temis pour chacune des activités », explique-t-elle. Un travail plus long qu'il n'y paraît. « Par exemple, un concept au sein d'une activité ou d'un marché est identifié par une vingtaine de mots dans la presse spécialisée », indique l'ancienne consultante de PricewaterhouseCoopers.

Avec la phase de tests indispensable pour s'assurer de la pertinence des réglages, le projet s'est étalé sur plusieurs mois. Aujourd'hui, 400 experts accèdent aux sources spécifiques – des magazines spécialisés – indexées par Leonard pour le compte de la branche Securities Services. « La qualité de l'information délivrée prime sur la quantité », plaide Pilar de Terry.

Elle a par ailleurs mis en place un système d'alerte bi-hebdomadaire pour informer par courrier électronique ces utilisateurs très occupés qui ne prennent pas toujours le temps d'aller sur le portail de veille. Perfectionniste, elle souhaite ajouter un contrôle qualité pour réduire le bruit, ces articles qui passent au travers des mailles de Temis. Si la diffusion des sources spécialisées est restreinte, quelque 2 600 employés de Security Services accèdent aux informations plus générales diffusées par Leonard, en particulier la thématique sur la crise. « Le plus important pour notre succès a été la collaboration avec le know-how de l'équipe de Michel, ajoute-t-elle. Nous sommes au croisement des expertises intelligence des équipes IT et stratégie métier. »

Les utilisateurs noteront les sources

L'autonomie des communautés se vérifie aussi au quotidien. Un animateur se voit attribuer des droits administrateur pour répondre rapidement aux demandes de ses collègues. C'est lui qui a la responsabilité d'ouvrir l'outil de veille KB Crawl à de nouvelles sources (généralement payantes). Il dispose également des autorisations pour gérer les droits des membres de la communauté, même si en pratique, cette tâche reste souvent du ressort des informaticiens qui ont mené le projet.

La personnalisation voulue par Michel Bernardini descend jusqu'au niveau utilisateur. Celui-ci dispose, depuis l'espace Mon Leo, de quelques options de paramétrage (langue, nombre de résultats à remonter...), et demain il pourra réorganiser les modules à sa convenance, comme ce que proposent les portails classiques.

Plus original est l'ajout de widgets pour répondre à de nouveaux besoins : présenter l'information en fonction de son origine géographique, analyser le taux d'ouverture des documents et remonter les plus consultés sur la page d'accueil, surveiller les blogs... Et Leonard indexera bientôt des podcasts audio et vidéo et, surtout, il permettra aux utilisateurs d'apprécier la pertinence des documents via un système de notation. Un premier pas dans le collaboratif que Michel Bernardini souhaite développer.

Leonard, BNP Paribas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Aujourd'hui, l'enjeu consiste à bien gérer les demandes de chaque communauté. C'est le rôle du centre de compétences Leonard qui a été monté dès la naissance du projet. Outre BNP Paribas Securities Services, la branche Assurances est demandeuse, de même que les ressources humaines de  BNP Paribas CIB. Preuve supplémentaire du succès, des présentations de Leonard ont été effectuées auprès de grands groupes bancaires. Les veilleurs ont l'habitude de s'échanger des bonnes pratiques.

Michel Bernardini a par ailleurs noué des relations fortes et durables avec ses fournisseurs informatiques. Il est ainsi coprésident du club des utilisateurs de Polyspot. Il démontre ainsi que veille et collaboratif font bon ménage, en interne comme à l'extérieur de son entreprise.

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